Marc Seberg n'est plus. Le groupe rentrais a décidé de mettre
fin à une aventure démarrée au début des années
8o. Le dernier disque, ne serait-ce que par son titre " Le Bout des nerfs
", laissait présager un tel événement. Le morceau
" Quelque chose, noir " sonnait comme un faire-part de décès
: " Quelque chose noir se traîne/Dans le silence s'enfonce/et se
ronge les ongles et me ronge les sangs. " On y sentait une immense lassitude,
le besoin de passer à autre chose, l'envie de sortir de ce rôle
de groupe de roc littéraire, mélancolique et esthétisant.
Après l'explosion de Marquis de Sade, qui avait bouleversé le
paysage rock français, Marc Seberg, construit autour d'Anzia, le guitariste,
et de Philippe Pascal, le chanteur, sembla un temps incarner le second souffle
d'une new wave frenchy. L'heure était sombre, une musique grave et rageuse
en résultait, avec les références inévitables à
Joy Division ou Television. Mais aujourd'hui, attend-on vraiment de la musique
d'être angoissante et crispée ? Le noir et blanc ne semble plus
a l'ordre du jour. Parce que le monde bouge trop dans tous les sens (en bien
et en mal) pour que la musique soit autre chose que gaie et colorée.
Philippe Pascal, que son rôle de chanteur autiste, d'artiste maudit et
d'Artaud rocker coinçait de plus en plus, désirait quelque chose
de plus souple, de plus félin, de plus ludique. Peut-être aussi
de plus lumineux... Résultat : c'est la fin d'un des groupes phares du
rock européen. Comme si l'heure n'était plus au collectif mais
aux aventures solitaires...
Copyright : L'événement du jeudi, 1991